Récit de session Würm du 22/11/2022 - Blizzard hurlant
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AVERTISSEMENT : ces résumés de partie sont basés sur la campagne officielle de Würm "Les Enfants de la Rivière", lire l'intégralité vous expose donc à des spoilers.
Trigger Warning : les coutumes de certains
clans préhistoriques impliquent des aspects choquants pour nos
contemporains, tels que la polygamie, le géronticide ou le cannibalisme.
Ce jeu n'est pas centré sur ces aspects, mais reste destiné à un public averti.
Blizzard hurlant
(récit de session de Würm du 22/11/2022, conté du point de vue de Zortaq)
Face au colosse aux multiples visages hurlant au loin dans le blizzard, notre première impulsion fut de nous éloigner. Le vent nous malmenait, et Tara semblait particulièrement affectée !
Je repérai un peu en arrière une anfractuosité, et fit signe à mes compagnons de nous y diriger. Heureusement, l'entité gigantesque ne nous remarqua pas, et c'est tassés dans l'étroite cavité que nous avons tenu conciliabule, tentant de nous réchauffer alors que nous étions tassés, le menton entre les genoux.
Dehors nous apercevions la créature piétiner sur place, puis à grandes enjambées repartir par le fond de la vallée. Nos opinions restaient partagées : Garll nous poussait à bouger, avancer nous réchaufferait nous disait-il. J'étais plus pessimiste à ce sujet et proposait à Garll de faire appel aux esprits afin qu'ils nous inspirent la bravoure nécessaire pour faire face à cette épreuve, mais notre chamane balaya ma proposition à juste titre : faire appel aux esprits si proche d'un tel être surnaturel risquait d'attirer sur nous son attention.
Kodä a alors suggéré d'avancer prudemment afin de découvrir d'éventuelles options pour éviter un combat désespéré. Nous avons suivi son conseil.
La vallée se séparait entre le lit de la rivière de glace, apparemment débouchant rapidement sur une impasse tandis que la rivière plongeait sous les montagnes. De l'autre côté, la vallée était large mais nous apercevions encore la sentinelle gémissante, continuant sans fin à faire des allées retours.
Les questions se bousculaient dans nos têtes : comment passer ? Fallait-il rebrousser chemin afin de nous ressourcer et d'affronter cette épreuve ? Ou la tourmente, l'appréhension et la fatigue ne feraient-elles qu'émousser nos forces déjà entamées ?
La confrontation ne paraissant pas une solution viable, nous avons décider d'avancer discrètement, parmi les congères et pins épars de cette vallée, nous espaçant afin d'éviter de représenter une présence trop évidente pour les nombreux yeux du gardien. Et pour donner une chance de survie aux autres si l'un d'entre nous était repéré. J'étais réticent à prendre ce risque, mais je me laissais finalement convaincre.
C'était folie.
Lorsque les lourds pas se sont déplacés en direction de Tara, le doute n'était plus permis : le géant hurlant l'avait repérée avant même qu'elle ne l'ait dépassé !
Tara évalua ses chances. Elle ne parviendrait pas à fuir suffisamment vite. Il lui fallait surprendre l'abomination, courir droit sur elle en espérant la dépasser. La chasseresse s'élança, suivie de près par Garll, s'en remettant à l'instinct de celle-ci.
Kodä et moi étions pris de court. J'improvisais une diversion, tirant de ma fronde un projectile en visant l'un des versants de la vallée, provoquant le glissement de quelques pierres, mais cela ne fournit qu'une brève diversion. Tara l'exploita sans hésiter, se saisissant de son épieu en pleine course, glissant entre les jambes de la brute faisant plus de trois fois sa taille, et tailladant son talon. Le cri de rage qui suivi résonna autour de nous. La morsure de l'épieu enchanté était assez vive pour blesser cet être glacial.
Garll s'arrêta, prenant conscience de la témérité de Tara, et se souvint des enseignements de Vors. Certains rituels, censés protéger les membres du clan des mauvais esprits, seraient peut-être capables de blesser directement de tels esprits. Sans certitudes, mais sans hésitations non plus, Garll entama une litanie dans le froid, sachant que notre salut résidait dans ce "peut-être".
J'étais encore en train d'hésiter à exploiter le maigre avantage que nous procurerait encore une attaque surprise, alors que Kodä s'élança bravement et me remis les idées en place. Tara et Garll n'avaient pas besoin d'un plan élaboré, ils avaient besoin d'aide, maintenant. Je m'élançais vers Tara, tentant de combler la distance. Un épieu jeté par Kodä siffla au dessus de ma tête et se ficha dans le bras de la taille d'un tronc de l'horreur massive.
L'être glacial ne sembla pas remarquer cette blessure, ne saignant même pas. Mais la pointe était enduite d'un poison virulent concocté par Kodä, et ayant reçu la bénédiction de son épouse Nayama qui avait fait appels aux esprits des bêtes afin de lui conférer la puissance insoupçonnable d'une morsure de serpent. Ce même poison provoqua un nouveau hurlement, cette fois-ci de douleur !
La créature tenta futilement de couvrir ses innombrables oreilles, alors que la voix de Garll achevait dans un crescendo d'enjoindre les esprits de l'eau à balayer avec la force d'un torrent les puissances néfastes incarnées devant nous.
Pendant ce temps Tara frappa l'arrière du genou du colosse qui tituba. Je tentai d'enfoncer l'arme dans son autre jambe mais son chancellement me bouscula et ma pointe de quartzite rouge ne fendit que le vide.
C'est alors que l'ennemi riposta. Malgré l'adrénaline qui nous poussait à combattre et notre chance jusqu'ici, l'énormité de ce à quoi nous faisions face nous fut brutalement rappelée. Le genou ployé, il pencha sa carcasse sur nous et sa paume frappa Tara de plein fouet, chassant l'air de ses poumons, la plaquant au sol. Le genre de coup dont beaucoup ne se relèvent pas.
Alors que le géant était à ma portée et qu'il venait de mettre à terre notre amie, j'enfonçais de tout mon poids ma lance dans son poitrail blafard.
Son hurlement retentit longuement dans les gorges environnantes. Puis, comme si ce cri l'avait vidé de toute vie, son corps massif s'effondra, manquant de peu d'achever d'écraser Tara. Celle-ci, encore animée par la rage du combat, eu le temps de se relever chancelante et d'écraser avec hargne l'une des têtes désormais inerte. Et s'effondra sur place, terrassée par une vive douleur dans le dos, incapable de se remettre debout.
Tandis que Kodä et moi portions Tara avec précaution, évitant d’aggraver sa blessure, Garll nous avait désigné une grotte dans laquelle nous trouvions. Kodä déploya toute son habileté pour soigner ses blessures.
Heureusement, ses épais vêtements et la neige avaient amorti la frappe qu'elle avait subit, et si son corps était contusionné et perclus de douleurs, Tara pourrait à nouveau courir et chasser. Garll sermonna longuement cette dernière sur son inconscience, refusant d'abord avec opiniâtreté de la purifier rituellement tant qu'elle ne reconnaîtrait pas sa folie.
J’intervins non sans malice : lui-même était fou d'avoir couru à sa suite, et Kodä et moi l'étions tout autant de les avoir suivi dans cette confrontation suicidaire. Maintenant que nous avions déterminé qu'aucun d'entre nous n'avait agi comme des personnes saines d'esprit, je proposais de l'accompagner tandis qu'il accomplirait une cérémonie afin d'apaiser l'esprit de l'entité vaincue.
M'approchant à nouveau du corps inerte, massif, je frissonnai. Bien que j'avais du mal à croire que cette chose était réelle, cette fois-ci il ne s'agissait pas d'un subterfuge ou d'une illusion. Les visages appartenaient à la fois à des hommes et femmes ours autant qu'à des faces-plates. Leurs yeux laiteux, bien que désertés par la lueur qui les animait, restaient écarquillés dans la mort, et leur bouche démantibulée figée sur un cri sans fin. J'avais du mal à saisir les implications de l'existence d'une telle horreur, mais mes suppositions me remplissaient d'un profond malaise, et je fut finalement soulagé lorsque nous avons achevé les démonstrations de respect envers les esprits locaux.
Nous avons passé le reste de la journée et la nuit sur place pour nous remettre de l'âpre lutte. Je parvins à poser maladroitement un collet, mais lorsque je souhaitais rendre hommage à Henki en dessinant les cornes spiralées sur les parois de la grotte, ma main tremblante rendit la représentation brouillonne. Heureusement, Kodä et Tara furent plus inspirés. De même, lorsque j'essayai d'enchanter un nouvel épieu pour Kodä afin de le prémunir contre les prochaines menaces, les esprits restèrent sourds à ma requête. Peut-être en avait-je déjà trop demandé lors de ce combat ?
Nous sommes repartis le lendemain pour une marche longue, franchissant cols venteux et pierriers gelés, contemplant des paysages majestueux. Les terres natales de nos ancêtres s'étalaient devant nous dans un silence intimidant. Nous avons fini par nous engager dans une série de gorges, d'abord étroites et raides, puis partiellement aplanies par l'écoulement du glacier. Après avoir gravie une de ces coulées cristallines, nous nous sommes engagés dans une caverne large de plus de vingts pas.
Kodä pris la tête de notre équipée, inspiré par l'esprit troglodyte de Kani’hounâ. Nous avons traversé une vaste salle au sol argileux, puis nous sommes engagés dans un boyau sinueux. La température de la grotte était bien plus clémente que celle du glacier à l'extérieur, mais nous remarqué des traces de pas sur le sol, vraisemblablement récentes. Apparemment plusieurs hommes-ours étaient passés par ici, peut-être les descendants de nos ancêtres auraient survécu au schisme du clan de la Source Fumante en se réfugiant ici ?
Nous avons franchit quelques salles supplémentaires, modestes ou vastes, planes ou accidentées. Le tunnel serpentait longuement dans les ténèbres, uniquement éclairé par la lumière dansante de nos torches.
Soudain, une lueur lointaine, verdâtre, émanant des murs. Nous avons éteint nos torches par prudence, et Garll s'est avancé subrepticement, avant de nous faire signe de le rejoindre.
Devant nous, la vision grandiose d'une salle gigantesque, traversée par un cours d'eau né d'une cascade à une extrémité de la caverne, puis se mêlant à une rivière de galets. La lueur émeraude semblait diffuser des murs eux-mêmes.
J'aperçois au bord du ruisseau un groupe d'une demi douzaine de silhouettes d'hommes-ours assis, pourtant au lieu de me rassurer cette vision m'inspire une étrange répugnance. Les silhouettes me semblent anormalement obscures, comme si l'on avait donné corps à des ombres elles-mêmes.
Garll et Tara décident de s'embusquer sur une corniche étroite, tandis que Kodä et moi nous avançons au bord de la dépression surplombant les galets, méfiants mais à la recherche de réponse. À notre vue, les silhouettes se relèvent et se tournent en notre direction. Par un jeu de lumière, je parvient à mieux discerner leurs traits. Des chevelures couleurs de cendre, des yeux luisants comme des braises ardentes, des visages noirs comme le charbon. L'un d'eux domine les autres d'une tête, et sans qu'il prononce un mot, son nom est comme une certitude.
Athran-mak.
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